Verre dépoli façon bistrot,
cuiller à trous, juste un peu d’eau
là, sur le sucre : l’absinthe est prête,
il sacrifie à la Reine Verte.
Vapeurs bleutées de l’assommoir,
sur le chemin du delirium
sa tête tourne comme un vélodrome
et il claudique jusqu’au Chat Noir.
Une affiche du Café Concert,
Van Gogh, un divan japonais,
une vieille rengaine d’Yvette Guilbert…
De la dentelle blanche comme du lait,
les cheveux comme une auréole
la Goulue fait mousser le vaurien :
sa jambe de soie noire dans la main
lance au ciel son pied qui s’envole…
Le cancan vient de démarrer
car Valentin-le-Désossé
joue les pantins dégingandés
sur le bastringue désaccordé.
Jolies silhouettes peintes à l’huile
en toile de fond, c’est Jane Avril…
voici enfin le numéro
de la célèbre Cha-U-Kao,
danseuse nue ou habillée,
fausse japonaise bien maquillée,
belle acrobate et femme facile…
Elle a de quoi rendre fébrile,
cette peinture qui me remue,
me pique l’échine telle une dague :
Toulouse croque les filles de la rue
et cueille les fleurs de terrains vagues…
©Thierry Vaganay (SACEM 941.315.00).
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